Céline Etchetto – Faire des choix et les assumer

Céline Etchetto, que vous allez entendre dans l’épisode du jour, Directrice déléguée de l’offre de soins et la préparation aux situations sanitaires exceptionnelles à l’Agence Régionale de Santé Nouvelle Aquitaine, et a fait toute sa carrière dans la santé publique. 

Je l’ai rencontrée pendant la journée dédiée à la réussite professionnelle des femmes co-organisée avec un réseau de femmes hauts fonctionnaires, et son discours m’avait marquée par sa force, et ce mot qui revenait toujours : choix. Un mot clé quand on parle d’équilibre vie pro vie perso, et qu’on omet trop souvent.

Avec Céline, nous avons évoqué :

  • Le sentiment d’utilité, de service, qui est le moteur de son engagement au travail

  • Son appropriation du mot « réussite », pas du tout limité à la sphère professionnelle

  • La manière dont elle a appris à dire non

  • Comment elle a détaché sa personne de sa fonction pour se préserver après un épisode de burnout

  • La naissance de ses filles et comment ses choix de vie et pro ont été impactés

  • Ce que signifie travailler beaucoup, sans porter de poids émotionnel

  • La manière dont elle met à distance la culpabilité qui pointe parfois

  • La phrase qui lui a changé la vie pendant son travail avec une coach

C’est un épisode d’une grande sincérité, d’une grande sagesse – et je vous invite, en écoutant Céline, à vous poser la question de vos choix, mot crucial quand il s’agit d’équilibre vie pro / vie perso.

Bonne écoute !

Xx

Sandra 

 

Et à nouveau, je voulais vous proposer cet épisode à l’écrit :

Je suis très contente d’accueillir Céline dans les équilibristes quelques mois après notre rencontre la première fois. Je démarre l’épisode en lui demandant qui était la Céline à l’âge de sept ans ? Savoir de quoi elle rêvait, dans quel contexte elle grandissait et les messages qu’elle recevait.

Céline :

Alors j'avais sept ans en 1983, donc ça remonte à quelques années déjà. J'étais une petite fille qui vivait dans un environnement rural, dans un petit village au nord de la Gironde, et un petit village qui avait encore la chance d'avoir un école, un collège, un environnement social assez développé. Donc je suis enfant unique, déjà si tournée vers moi même, en introspection. Je suis une enfant qui aime lire. Je recherche la compagnie des autres parce qu’en tant qu'enfant unique, je recherche la compagnie des autres, très proche de mes parents, mais avec une envie de curiosité sur le monde assez importante. Je ne suis pas encore partie en vacances parce que mes parents ne partaient pas en vacances à ce moment là en tout cas. Une envie de découvrir le monde qui était importante et quand même un environnement. Je n'ai pas connu mes grands parents maternels, j'ai connu que mes grands parents paternels et qui habitaient dans une ferme. Et donc des attaches rurales importantes et des souvenirs que je garde encore aujourd'hui.

De vraies valeurs, des valeurs fortes que mes grands parents, m'ont inculqué et mes parents, pareil, ont partagé avec moi. Et puis beaucoup d'odeurs, de différents événements de la campagne qui a rythmé par les vendanges, par les foins, par tous ces moments là. J'ai cette vie un peu rurale on va dire, mais moi j'y vis pas. Donc j'ai cette chance de pouvoir y aller, tous les week ends, tous les dimanches. Et curieuse, curieuse, très curieuse, envie de sortir…

Et quand tu parles de ces valeurs fortes, c'était quoi ?

Ah, les valeurs. Ma maman, ma grand mère et mon grand père sont des gens qui, comme mes parents, qui ont la valeur du travail, c’est une valeur importante. La valeur de l'honnêteté, ce sont des gens simples, des gens de la terre, donc des gens honnêtes, des gens qui travaillent, qui n'ont pas de repos. Donc ça c'est un peu compliqué parce que, je l'apprendrai un peu plus tard, cette notion de repos qui est importante dans l'équilibre de vie. Mais en fait, dans ces vies, tu n'as pas d'équilibre entre une vie professionnelle, une vie personnelle. Tu côtoies et tu fais tout en même temps et tu te pose pas de question. Tu apprends à pas poser de questions, à avancer. Et ça c'est l'environnement extérieur dans lequel j’ai appris qui me fera comprendre que ma vie est un petit peu différente. Et puis de l'autre côté, je vis dans une famille, du côté de ma mère où il y a quatre frères et sœurs, j'ai des supers cousins, j'ai une petite cousine qui va arriver plus tard du côté de mon père, des cousins et des cousines. On vient plutôt d'une famille cette fois-ci d'artisans, d'ouvriers, donc la culture de l'ouvrier. Et j'ai un grand père que j'ai pas connu, mais un grand père qui a beaucoup fait pour les droits, qui était syndiqué, les jours de congés, qui s'est battu, dans les années 40-50, sur ces droits-là et donc une culture finalement agricole et une culture ouvrière. Et ils vont me construire parce que les valeurs sont les mêmes.

T'as toujours travaillé, t'avais toute ta carrière dans la santé publique. Qu'est ce qui t'a donné envie de démarrer des études là dedans ?

Alors je pense que j'ai toujours eu envie d'avoir un métier pour aider les autres. Je pense qu'inconsciemment j'avais et j'ai toujours eu envie d'avoir un métier tourné, tournée vers le public. Je ne savais pas encore sous quelle forme. Je fais partie d'une génération ou au lycée, je ne savais pas trop ce que j'avais envie de faire et j'ai retrouvé d'ailleurs des camarades ici. C'est très drôle. J'ai pas mal de copains qui voulaient faire médecine et donc c'était pas forcément mon envie particulière. Je suis allée en première année de médecine à Bordeaux. Bon ça n’a pas été très concluant, mais par contre quand tu es reçu en médecine, tu peux intégrer la fac de sciences. Et donc ce qui n'était pas non plus mon objectif principal. Dans les couloirs de la fac, j'ai entendu une voie qui est celle d'un professeur en santé publique qui s'appelle Roger Salamon, qui avait monté une école, un institut qui s'appelle Institut de santé publique et développement à Bordeaux quelques années auparavant, dans les années 80-90.

Et donc j'entends cette voix, je rentre, je l'écoute et quand il parle de santé publique, il est passionnant parce que la santé publique c'est très large. Dans mon quotidien aujourd'hui, j'avais pas en tête le métier que je voulais faire. Mais par contre, je savais que c’était dans la santé et que je voulais faire un peu de gestion. Et donc voilà, ça se dessine un peu. Et puis chemin faisant, je rentre dans cette formation qu'ils avaient mis en place. Et puis je fais mon premier stage à la MSA Agricole, premier stage des étudiants et donc là un premier contact avec le système de santé. Et puis l'année suivante, je pars à la Sorbonne faire un parcours en Économie de la santé. Et puis la deuxième rencontre qui est celle de Jean-Luc Sagnol qui est directeur d'hôpital, qui vient d'arriver à l'hôpital Sainte-Anne à Paris, puis la neuro psychiatrique, et donc qui est mon prof de droit hospitalier. Et là je comprends que ça me plait beaucoup et il me prend en stage, je fais mon stage chez lui et là c'est une révélation parce que l'hôpital psychiatrique, tu vis avec les usagers, tu vis avec les patients qui se promènent dans l'hôpital. Et j'ai beaucoup de chance parce que ce premier poste, il est sur le projet médical, j'accompagne ce projet médical et là c'est une révélation. Je me dis que je veux travailler dans le service public, je veux travailler à l'hôpital et que je peux éventuellement y être utile.

Et lien avec l’innovation…

Oui parce que tu vois, j'ai toujours aimé mon métier. J'ai fini quelques années plus tard par devenir directeur d'hôpital. Et tu fais pas ce métier si dans ton quotidien, de près ou de loin, par rapport aux fonctions que tu occupes bien sûr, tu sais pourquoi le matin tu te lèves, tu sais pour qui tu viens travailler. Moi je viens travailler pour les conditions de travail des professionnels. Ça c'est ce qui me tient. Faire avancer les projets des équipes médico soignantes et ensuite in fine, on fait tout ça parce qu'il y a un usager, un usager qui va bien dans des services, des urgences, des services de médecine, de cardiologie, de chirurgie et que t'as envie de bien le prendre en charge. Les métiers administratifs sont souvent un petit peu oubliés. Mais je dis toujours qu'on est une équipe. C'est à dire que c'est sûr qu'un hôpital sans médecin, il tournerait pas, mais sans ses équipes administratives, logistiques et techniques, il ne tournerait pas non plus.

Tu es la mère de deux filles. À quel moment de ta vie et de ta carrière elles sont arrivées ?

Alors elles sont arrivées à un moment de ma vie. Elisa est née en 2006. À un moment, j'avais 29 ans, pas 30 ans quand elle est née. Tout simple, j'avais pas forcément encore envie, peut être d'une carrière parce que c'était pas le moment. Voilà, c'est une vie simple, entre guillemets. Le père de ma fille, ma fille, il avait envie d'un enfant, j'avais 30 ans et j'avais envie par contre d'avoir un enfant. Ça c'était une évidence. Et elle a été désirée, elle a été choyée. C'est un moment extraordinaire, très très très émouvant. Je vois. Là, c'était c'était une évidence. Après ça, c'est un peu compliqué entre guillemets, parce que quelques mois plus tard, en effet, commencer la notion de carrière est arrivée. Elle était petite et je suis partie à l'école de Rennes. J'ai passé des concours et ma fille il y avait à peine deux ans. Et donc ça, ça a été une vraie, une vraie rupture, un vrai déchirement que j'ai probablement un peu mis de côté, mais j'étais très soutenue par le père de mes enfants dans ma carrière, dans cette évolution de carrière.

Mais c'est vrai que d'avoir laissé ma fille était un moment compliqué, probablement qui m'est revenu plusieurs années plus tard.

Et Valentine, c'est pareil. Il y a des moments extraordinaires. Valentine a été aussi très désiré et elle est arrivé pendant ma formation à l'école de Rennes, parce que là, j'avais conscience que je commençais à avoir 30, 32, 33 ans et que si je voulais un deuxième enfant, fallait pas que je tarde trop. Biologique. Et puis, d'un point de vue d'organisation et de carrière donc, Valentine a été conçue pendant que j'étais à l'école. Donc Valentine, c'est l'enfant du mouvement, elle a beaucoup bougé. On a travaillé ensemble jusqu'au dernier moment et on est même allé à l'école de Rennes. Alors qu’elle, je l’allaitais.

J'ai accouché le 17 avril à Bordeaux, à Bordeaux et un mois et demi plus tard, j'étais à l'école de Rennes avec ma maman et mon bébé sous le bras et j'allaitais entre deux cours.

Je voulais faire comme tout le monde en fait. Comme si c'était rien. Je voulais valider mon semestre etc. Ce qui n'est pas une bonne idée en soi. Parce que avoir un enfant, pour les femmes qui vont nous écouter, c'est pas un événement anodin mais très important, un bouleversement hormonal extraordinaire et que c'est des moments très précieux et que j'aurais dû m'abstenir. Probablement oui. Je suis infiniment reconnaissante à ma maman qui m'a accompagnée pendant ces 15 jours - 3 semaines à Rennes, qui promenait ma petite fille, qui m'appelait pour l'allaiter. Oui, c'est les souvenirs…

Mais voilà, ça fait partie des décisions que quand tu la regardes avec le recul, que tu sais pas dire non, tu n’es pas d'accord. Mais sur le moment oui. Parce que je voulais avoir ma scolarité. Parce que je ne voulais pas redoubler, parce que je voulais finir.

Je lui dis alors : « Tu voulais tout avoir, on va parler de ça. » 

On s'est rencontré avec Céline au cours d'une journée dédiée à la réussite professionnelle des femmes, organisée avec le réseau Mariana, qui est un réseau de femmes haut fonctionnaires en Nouvelle-Aquitaine. Et on a beaucoup parlé de réussite ce jour là et j'avais envie qu'on revienne sur ce terme. Donc je lui demande : « Parce que ça veut dire quoi pour toi réussir ? »

Alors moi j'ai en tête Sandra, notre premier entretien quand tu es justement venue m'interroger, préparer cette journée et on a eu un mot ensemble qu'on a trouvé qui était la réussite raisonnée et j'ai beaucoup apprécié ce terme là. Le mot réussite n'a pas à revêtir pour moi plusieurs aspects et je pense que pour beaucoup d'entre nous, surtout un épanouissement, le moment où le mot de réussite n'a plus beaucoup de sens aujourd'hui, je pense que parce qu'il va s'appuyer sur différents fondamentaux, surtout quand on est une femme, on doit tenir plusieurs équilibres dans nos vies. C'est un ensemble en fait, un ensemble dans lequel tu vas faire des choix. C'est très intéressant. Les collègues avec qui on était justement à la table ronde, on voit bien que l'ensemble d'entre elles ont du faire des choix professionnels pour réussir au sens strict du terme. Moi la réussite aujourd'hui, elle passe par cet équilibre de vie professionnelle et personnelle. C'est me sentir utile à mon travail, voir accompagner des équipes, accompagner des produits de santé publique dans mon nouvel emploi aujourd'hui.

Et puis pouvoir être présente auprès de mes enfants, de mon compagnon, de mes parents qui vieillissent. Et je pense que aujourd'hui, c'est important d'accompagner un accompagnement. Là, j'ai pas de notion de réussite professionnelle ou de carrière.

Et du coup, j’ai voulu rebondir : Oui oui, c'est marrant parce que justement t'as dit faire carrière, ça veut dire quoi pour toi une carrière ?

Pas une carrière dans les métiers que moi en tout cas, j'exerce. C'est un métier avec des responsabilités, où tu deviens un chef d'établissement, où tu deviens directeur général adjoint d'un gros C.H.U. C'est d'avoir des postes à responsabilité importants. Mais dans les métiers qui sont les nôtres, c'est des métiers qui sont soumis à mutations. C'est à dire que pour pouvoir évoluer, il faut que tu puisses partir. Ça fait partie des condition sine qua non de l'évolution et parfois ta vie personnelle ne te permet pas de pouvoir faire ceci. On va peut être en parler un peu plus tard. J'ai fait un épuisement professionnel en 2013-2014, ce qu'on appelle un burn out et j'ai eu un très très bon thérapeute et un très bon coaching. Et j'ai une phrase qui me tient beaucoup, c'est celle de « Choisir c'est renoncer » et de faire des choix qui sont en adéquation avec tes envies, tes aspirations. De n'avoir jamais de regrets, jamais de regrets. Et en fait, c'est ça, je pense que cette réussite raisonnée, probablement que j'aspire ou que j'aurai aspiré ou j'aspire dans mon évolution de carrière.

Mais voilà les choix de la vie et je suis très heureuse du poste que j'occupe aujourd'hui à la Nouvelle Aquitaine. J'ai un épanouissement professionnel, je me sens très utile, disait le directeur général aux vœux qu'il a émis il y a quelques jours : un sentiment d'utilité. Je ne suis plus en établissement, mais je sens que je vis tous les jours. Je me sens très utile et moi, ça me suffit à me nourrir.

Voilà, ça me nourrit. Et si un jour j'ai une opportunité, je pense que je fais partie de ces gens, en tout cas toutes ces femmes, je suis à l'opportunité. Je ne suis pas à la construction, mais on est tout un peu différent.

Justement, c'est vraiment ce qui m'avait marqué dans nos échanges, c'est cette notion de choix et ça sera le fil rouge de cette discussion je pense. Mais elle m’a partagé et qu’elle avait refusé une mobilité géographique…

Alors sans partager ma vie personnelle, je suis en garde alternée. Et donc ce qui fait que quand tu es en garde alternée ou même si tu t'es pas en garde alternée, il aurait fallu que je parte de la région bordelaise pour pouvoir accéder à ce type de poste. Et aujourd'hui je souhaite accompagner. En effet, mon aîné est en première, elle va passer le bac, ma seconde est en quatrième et aller jusqu'au baccalauréat, je pense que c'est important pour moi. C'est quelque chose, c'est un vrai engagement, une vraie responsabilité. Et ça me plait, ça me va bien. Mon compagnon travail aujourd'hui à Paris, il travaille aussi un peu à Bordeaux. Et dans une vie idéale, je l'aurais suivi. Mais aujourd’hui, j’équilibre.

Et je trouve ça super intéressant ce que Céline dit dans cette vidéo. Je pense qu'on se trompe beaucoup sur la notion d'équilibre en raisonnant dans une vie idéale et en oubliant qu'on vit dans la réalité.

On vit pleinement. Et si tu ne vis que dans l'inspiration de ce que tu es, de ce que va être demain, là aussi, et ça fait beaucoup partie des préceptes dans l'accompagnement thérapeutique et dans le coaching où on le dit beaucoup, mais on le fait pas beaucoup parfois, c'est vivre dans le présent. Et en effet, ce présent là, je l'ai mesuré parce que je faisais partie de ces gens qui toujours avaient un pied devant, toujours un pied, toujours d'avance, un pied demain. Et en fait un jour j'ai compris que non, il fallait avoir un pied dans le présent. Et c'est quand t'apprécies ton présent que tu as des rêves et des aspirations. Parce que je pense que c'est important d'avoir des rêves, des aspirations, mais par contre qu'elles ne viennent pas nuire à ton présent, qu'elles ne viennent pas gâcher ce présent là. Parce que plus tu regardes devant, moins tu vas profiter d'aujourd'hui. Et je pense que cet équilibre là, il est très précieux. Après, je suis bien aidée, j’ai un compagnon aujourd'hui qui est ancré dans le présent et donc je suis bien, je suis bien aidé aussi.

Elle en a parlé de cet épuisement professionnel en 2014. Et je me suis souvenue que Céline m’avait dit cette phrase : « Je me dis ma façon de travailler n'a plus jamais été la même. Je suis très heureuse. »

Oui, ma façon de travailler parce que tout à l'heure tu me demandais : Travail à l'hôpital, l'utilité, le sens. Je pense que j'ai exacerbé ce sentiment d'utilité. Et comme un jour on m'avait dit je ne suis pas un Saint-Bernard et probablement j’en ai fait partie il y a quelques années et je pense qu'aujourd'hui il y a des collègues qui le vivent dix fois plus que moi par les difficultés du système de santé, j'ai voulu sauver l'hôpital dans lequel je travaillais, qui était, qui rencontrait différentes difficultés financières, organisationnelles et je m'étais mis cet objectif dans la barre et très haute. Cette pression de trouver cet hôpital, de sauver ce qui est ailleurs, assez improbable parce que tu ne peux pas te mettre ce genre de pression toi même. Et finalement ce qui est arrivé… Et donc en effet, j'ai eu cette opportunité. Je suis arrivée dans un nouvel établissement et quelques mois plus tard, la fatigue, Madame, ma bonne amie est arrivée. Je n'ai pas pu, à un moment donné, ne pas ne pas être arrêtée.

On ne s'arrête pas soi même, on est arrêté par un médecin.

Et puis, comme je le disais, mon établissement m'a accompagné, m'a proposé un coaching professionnel et puis, parallèlement, j'avais développé une thérapie. J'avais dissocié les deux. C'était important parce que souvent on explique que tu fais un burnout, mais globalement, tu es un petit peu responsable de ce qui t’arrive. Et souvent, c'est parce que ta vie personnelle…

Moi, j'ai toujours eu à cœur de pouvoir bien distinguer les choses, même si malheureusement, à un moment donné, les deux, tout est lié. Ce qui me c'est important pour moi, c'est de me réinterroger. Je fais partie de ces gens qui réfléchissent parfois un peu trop. Et je me suis dit mais j'ai un problème, je le sais, je suis capable d'accepter mon diagnostic. Mais par contre, j'ai besoin d'aide pour le résoudre. Et c'est là où le coaching m'a beaucoup aidé. Et je vais citer son nom parce que oui, je lui en suis infiniment reconnaissante. Elle s'appelle Annie Fortin, elle fait une reconversion. Puis elle est devenue coach, Annie. Annie m'a beaucoup aidée et j'ai beaucoup compris à ce moment là parce que dans une des étapes, tu fais le film de Karpman où on te dit tu n'es pas une victime, tu n'es pas un bourreau et tu n'es pas un sauveur.

Et donc en fait, il faut que tu sortes de ce truc là parce que sinon tu deviens infernale. Et dans les fonctions qu'on peut avoir nous, tu peux rapidement être dedans. Et puis moi j'étais ce sauveur, je voulais sauver, sauver, sauver, sauver. Finalement, tu finis par devenir une victime parce que tu finis par te plaindre et finalement tu es un bourreau, etc. Et Annie, elle m'a appris à sortir de ça. Et après le coaching, j'ai appris à savoir dire non avec tact et mesure. J'ai travaillé, je travaille toujours beaucoup, mais par contre avec une vigilance sur moi même, mes collaborateurs, même si je fais beaucoup travailler les gens. Mais je suis très vigilante à ça.

Et ça, ça m'intéresse vraiment parce que je pense que dans les auditrices des Equilibristes, il y a beaucoup de femmes qui travaillent beaucoup et ça m'intéresse beaucoup ce que dit Céline sur « je travaille beaucoup et j'ai une vigilance. » Et elle m’avait dit « c'est pas les mêmes fatigue que je ressentais. »

Non pas du tout, parce que alors ça, ça a été aussi avec à la fois le thérapeute et à la fois le coaching parce que il faisait un peu de sophro. Mais globalement quand t'es dans je sais pas, il y en a qui se reconnaîtront, mais les gens qui font un burn out sont souvent cette hyper sensibilité. Cet engagement fort. Et c'est vrai, je pense de dire à un moment donné et moi j'ai beaucoup appris, je te dirai pas comment je le fais parce que je sais pas.

Mais tu reçois. Avant je gardais tout et je sentais un poids physique, je sentais un poids émotionnel. Santé physique et la thérapie et le coaching m'ont appris à je prends mais je ressors, je me dégage.

Il y a la fonction et la femme et la personne que je suis. Et en fait j'ai dissocié ma fonction et la personne que je suis. C'est pas moi qu'on vient attaquer, c'est pas moi qu'on demande, c'est la fonction que j'occupe et la responsabilité que j'ai, elle est partagée avec d'autres personnes. Et que quand on a un cap, quand on a une vision, parce que c'est ça qui est important dans les missions qu'on te donne, quelle est la vision qu'on te donne du sens qu'on va donner à la mission qui est la tienne ? Ça change énormément les choses. Et donc ça aussi, j'ai beaucoup appris dans le coaching, il y a beaucoup de mots clés. On a fait dix séances. Et donc j'ai toujours eu à cœur ensuite de repousser, prendre les problèmes, les résoudre. Si je les résous pas, c'est pas la faute de Céline. C'est parce qu'il y a différentes constats, différentes causes, etc.

Donc ça c'est très très important de pas personnaliser la fonction.

Être capable aussi avec beaucoup.

Très factuel d'expliquer aujourd'hui de quand il y a une difficulté, un diagnostic, les problèmes de transparents avec sa hiérarchie de pouvoir, c’est pas facile parce que moi j'avais cette notion aussi probablement dans les objectifs que j'avais. C'était apprendre à savoir dire non et apprendre à déplaire parce que je faisais partie de ces gens bons élèves toujours atteints de résultats.

Et excellente tant qu'à faire. Sauf qu'aujourd'hui, tu as des obligations, plutôt de moyens que de résultats. C'est une succession d’outils qui ont été très, très, très, très importants dans ma carrière. Deux ans plus tard, ce qui m'est arrivé, j'ai eu à gérer un gros projet où je travaillais avant d'externalisation. Donc c'était une mission importante, difficile en soi mais j'ai pu faire cette mission parce que j'avais ce bagage émotionnel que je n'avais pas, que je ne portais pas. Mais individuellement, ça a concerné 89 personnes, je connaissais toutes les personnes, j'ai gardé mes valeurs de proximité, d'écoute et d'attention. J'accomplis ma mission, mais avec mes valeurs, l'accompagnement des agents. Mais je ne portais pas, je considérais.

Céline a eu l'occasion de mettre ça sacrément à l'épreuve aussi parce qu’elle a pris la direction du pôle qualité, gestion des risques, communication, culture et mécénat du C.H.U. de Bordeaux en janvier 2020, quelques semaines avant ce qu'on sait. Je lui demande donc « Comment tu as vécu cette période là justement ? Ça a été un peu le crash test de tout ce que tu avais mis en place. » 

C'est sûr que si j'avais probablement pas eu les épisodes de vie précédents, je n'aurais pas survécu entre guillemets à cette mission. Alors j'ai eu beaucoup de chance parce que j'ai une super équipe. J'ai une super collègue qui s'appelle Sophie Marron que j'espère faire venir avec moi dans Rosanna, Sophie et puis d'autres collaborateurs, Gaël, Axel j'en ai plein en tête. Des hommes et des femmes, des supers rencontres. Parce que la gestion de crise, il faut vraiment dissocier la fonction et la personne. Parce que si j'avais voulu sauver oulala, parce que chaque heure compte, chaque mouvement compte, mais je partais et c'est ce que je dis aujourd'hui à lARS où je travaille avec mes collaborateurs, on gère des tensions tous les jours. Il faut voir ce qu'on a fait jamais, ne pas regarder ce qu'on a pas fait. Donc le côté excellent, parfait. Il faut l'oublier.

Il faut être rigoureux. Mais par contre il ne faut pas faire de faux pas, de se mettre une barre trop importante parce qu'à un moment donné tu as des événements qui vont pas dépendre de toi. Et là en plus, il va y avoir beaucoup d'humilité dans cette gestion de crise. J'ai eu beaucoup de chance de travailler avec des scientifiques, des médecins, du staff, des professionnels, des équipes extraordinaires. Mais on se disait tous les jours ce qu'on ne sait pas, on ne sait pas. Donc on va faire ensemble, on va monter des hypothèses, on essaye, on innove, on s'adapte, on est flexible et on a fait ça et on a travaillé énormément pendant deux ans probablement. C'est aussi pour ça que j'ai souhaité aller vers d'autres missions. Parce que s'il n’y avait pas eu ces outils de recul, jamais je n'aurais traversé une épreuve comme ça.

Alors encore une fois, comme on est tous différents dans notre perception, tous différents dans nos vies, on va tous vivre différemment les fonctions qu'on va occuper. Tu as des gens qui naturellement ont ce recul. J’ai des collègues qui ont naturellement ce recul et je les entends, je les admire. Et puis j'ai réussi un peu à avoir cette âme, cette notion de recul. Et celle de l'enseigner aussi. De la partager.

« Mais alors justement, comment tu prends soin de toi, toi ? »

Je n'ai pas la réponse à cette question. En plus, avec les deux années qu'on vient de vivre… Comment je prends soin de moi ? Je dors.

J'adore. Oui, parce que quand t'es malade, tu dors plus vraiment très très bien. J'ai des plaisirs simples.

Le troisième mois, j'ai eu trois alertes. La troisième alerte a été la plus fatale entre guillemets. On s'est arrêté parce que quand on te parle du trou noir, c'est un vrai trou noir. C'est quelque chose d'assez particulier quand tu le vis. Le grand plaisir, c'est que tu apprends à vivre, tu réapprend à vivre. Et tu vois, je me revois devant ma cuisine et c’est ce qui m'a réappris à vivre. Je me suis levé tous les matins, le père de mes enfants m'a obligé. Il avait totalement raison à me lever pour emmener mes enfants à l'école. Ça m'a tenu. Mais surtout, j'ai réappris à aller faire mes courses. J'ai appris à me consacrer à une activité manuelle qui est à l'opposé de moi. Mais j'adore cuisiner, que tu trouves une activité dans laquelle tu prends du plaisir et dans laquelle tu vas pouvoir réapprendre.

Et moi je ne me rappelle que ce qui me tenait, c'était d'éplucher mes carottes, d'éplucher mes légumes. Et aujourd'hui, j'ai appris à lire. Je n'arrivais plus à lire.

Mes plaisirs, ils sont très simples. J’apprécie de faire mon marché, recevoir des amis… Par contre, je ne fais pas ce que j'ai fait dans ma vie d'avant, où je faisais beaucoup de choses et je ne savais pas dire non. Je fais partie de ces gens où je suis assez occupé la journée, et le soir j'ai besoin de calme, beaucoup de calme et donc des plaisirs du quotidien. Le vendredi soir c'est pizza et films. 

Dans la thérapie, on te dit faut projeter un moment de joie. Quand j'étais malade, j'avais des amis, un petit club du bonheur. On est huit ans plus tard, on continue à se projeter vers ce comité du bonheur, ça c'est ma joie. Je vais voir mes parents, qui vieillissent, une fois par mois. C'est hyper simple, je te parle pas d'aller au bout du monde.

Mais je ne suis pas parfaite. J'ai beaucoup lu le livre « imparfait et heureuse ». Christophe André, je l’ai beaucoup lu. J'arrête la pression. 

Des choses simples. 

Céline a été décoré en 2021 du grade de Chevalier dans l'Ordre National du mérite. Dans son discours, il y a une notion de service d'engagement public qui est très forte. Je lui demande donc « Qu'est ce que cette reconnaissance a marqué pour toi ? »

Alors elle a marqué d'abord la reconnaissance d'une équipe. Parce que la gestion de crise, certes, il faut une coordination, mais c'est un travail collectif. C'est venu récompenser un travail collectif, même si en effet, c'est nominatif, mais c'est venu récompenser le travail collectif. 

Le travail, c'est ma matière première, donc forcément celle du mérite est très en lien avec la valeur du travail. Donc j'ai forcément une pensée pour mes parents et mes grands parents parce que ça c'est cette médaille que je partage avec eux, parce que c'est leur valeur.C'était très touchant. 

On a eu cette remise pendant la période covid, donc on n'a pas pu inviter nos proches avec nous. On a eu une cérémonie en huis clos, dans l'intimité avec le ministre Olivier Véran. 

Mais on a partagé ensemble des moments forts. Et c'est vrai que c'est une reconnaissance du travail qu'on a eu. 

En effet, je pense qu'il y a jamais eu autant d'utilité ou de sens dans le métier qu'on a dans cette gestion de crise en fait.

C'était très émouvant et on avait envie de partager notre médaille avec tout le monde, parce qu'encore une fois, c'est une médaille du collectif. Je venais de consacrer une carrière de 20 ans dans le secteur de la santé, donc bien sur ça fait écho à mon parcours, mais je sais pourquoi je l'ai eue, je sais dans quel contexte je l'ai eue et je remercie les personnes qui qui m'ont permis de l'avoir.

Puis, on en vient au sujet des femmes managers, je demande donc à Céline : « Et justement, tu m'avais confié être très attentive aux managers femmes. Qu’est ce que t'as envie de leur transmettre ? »

Je pense que de plus en plus, et notamment 2022, on voit bien l'accompagnement important qu'il faut qu'on ait auprès des femmes qui ont envie de pouvoir avoir des postes à responsabilité mais qui tout autant vont avoir à élever des enfants si elles souhaitent en avoir et essayer de s'organiser, de vouloir tout faire. Et donc, je suis très attentive à mes collaboratrices qui souhaitent avoir des enfants. J'ai toujours un souvenir de femmes quand elles viennent annoncer à leur responsable qu'elles sont enceintes, le moment de solitude qu'elles traversent pour annoncer qu'elles le sont. Alors ça, moi ça m'est arrivé. Je dis vécu, mais j'ai eu beaucoup de chance, c'est que j'ai eu la peur de venir le dire et j'ai un directeur qui était un homme à l'époque et qui m'a très très bien accueilli. Et je me suis dit mais jamais plus je veux ressentir d'avoir peur de venir dire que je suis enceinte et donc ça je suis très attentive à ça.

Parce que ton enfant est la priorité. Moi, nombre de fois où j'ai laissé mes enfants, mes filles avec une nounou à la crèche alors qu'elles étaient malade… On accompagne. Mais de déculpabiliser.

Et puis d'avoir une vie. On a le droit de sortir à 18h-17h30 le soir, d'avoir envie d'aller faire du sport, d'avoir envie d'aller au théâtre, d'avoir envie de rien faire et qu'aujourd'hui c'est de prendre soin de nos enfants et d'être aidés par une organisation, d'avoir des dates, des moments à soi. Et ça, c'est important de pouvoir le dire que c'est possible. C'est possible. 

Et justement, dans nos échanges, Céline m’avait dit « on nous fait croire qu'on peut tout avoir, mais il y a vraiment une notion de choix » et je veux qu'on revienne quand même sur cette notion de choix.

Oui oui, parce que je pense sincèrement et les femmes que j'ai eu à rencontrer et qui ont une belle carrière, elles ont fait des choix et elles ont dans un sens ou dans un autre, c'est à dire de prendre quelqu'un, une nounou, s'occuper des enfants et puis celles qui en effet, ont peut être renoncé à leur carrière, mais parce qu'elles ont préféré leur enfant, mais qu'à un moment donné, c'est quand même encore un tout petit peu utopique. Aujourd'hui, beaucoup de managers et dans tous les secteurs, en France, on travaille beaucoup. Le volume horaire fait quand même partie des indicateurs de performance. Mais quand je dis ça, ça nécessite une organisation générale d'une entreprise, une structure. Et aujourd'hui, je pense que voilà, maintenant il y a beaucoup de choses à faire partout. Et c'est vrai que le temps compte. Et aujourd'hui, oui, si choisir c'est renoncer.

Je discutais encore avec ma fille hier soir, avec qui je ne suis pas là pour faire les devoirs tous les soirs, mais parce que le poste que j'occupe aujourd'hui n'est pas un poste où je peux sortir à 5h le soir.

Donc ça veut dire que les années précédentes, j'avais une petite jeune femme qui venait avec qui je suis infiniment reconnaissante, et des précédentes aussi parce qu'elles m'ont aidé dans mon organisation, mais parce qu'en effet, mon ex mari me l'a souvent dit, je ne connaissais pas la couleur des cahiers de mes enfants. Mais j'ai appris à déculpabiliser et on te le dit souvent « parce que vous préférez le temps qualitatif. » Mais un enfant, il n'entend pas ça. Un enfant qui a 4, 5 ou 6 ans, il n'entend pas que sa maman préfère la qualité contre la quantité.

Et donc je me demandais quel échange Céline a aujourd’hui avec ses filles, à ce propos là, sur sa disponibilité ou l'investissement dans son travail : « Comment elles voient ça et comment elles se projettent ?

Il y a eu différents moments de vie, des moments où ma fille aînée n'oubliera probablement pas.
Un jour, à l'âge de sept ans, j'avais promis de venir déjeuner avec elle et qu'elle m'a attendu une bouteille de vin tout un temps de la pause du déjeuner en disant à sa maîtresse que sa maman allait venir la chercher. Voilà, donc ça, c'est une culpabilité que tu portes. 

Ou le jour où je suis partie à l'école de Rennes, où j'ai laissé ma petite fille de 2 ans sur le quai de la gare. Je pense que j'avais enfoui cette douleur là, ce choix que j'ai porté longtemps. Et après, que j'ai assumé. Mes filles m'ont dit « Nous, on n’aura jamais le même métier que toi, on s'occupera de nos enfants. »

Je l'ai beaucoup entendu.

« Et comment tu fais avec cette culpabilité ? Alors justement, comment tu la mets à distance ? »

J'ai considéré que je sais aujourd'hui mettre du temps quand même à disposition plus depuis plusieurs années. Alors bon, malheureusement, les deux années Covid sont venu me faire mentir parce que j'ai beaucoup travaillé.Mais on a beaucoup partagé sur l'utilité de cette mission etc. J'essaye de préserver mes week ends, ça c'est important maintenant de ne pas travailler le week end, de leur consacrer ce temps là, de partir en vacances. 

Alors j'ai beaucoup de chance, c'est que le père de mes enfants, parce que c'est aussi un duo, ou alors dans une famille recomposée, on est plusieurs parents finalement, mais j'ai énormément de chance. Je suis infiniment reconnaissante à Xavier par son accompagnement parental.

C'est un projet de couple, c'est un projet de vie, c'est un projet de famille. Et Xavier a été d'une patience probablement très importante et il m'a permis aussi d'avoir cette carrière là, de pouvoir être, de devenir manager et de s'occuper de nos enfants davantage que je l'ai fait. 

Ce que j'essaie de faire aujourd'hui, c'est trouver le bon outil aux besoins du moment. 

Et c'est de ça que je discute avec mes filles, que chacun des moments de la vie, quels sont leurs besoins, qu'est ce qu'elles ont en attente ? Qu'est ce que moi, en tant que parent, je vais leur apporter mais surtout dans quelles personnes ressources je vais pouvoir compter ? 

Parce que nous on veut tout faire les femmes, on veut tout faire, on veut aller les chercher à l'école, faire la musique, on veut bien faire notre ménage. 

Le jour où tu comprends que tu peux pas tout faire, qu'il y a des choses sur lesquelles tu seras un peu moins parfaite, là de suite, ça va un tout petit peu mieux.

Mais par contre on a un dialogue. Tu me demandais par rapport à mes filles on parle de tout, on se dit tout. 

C'est pas l'enfant qui protège le parent mais l'inverse. Même si j'ai eu une période de grande fragilité où elles m'ont vu en grande période de vulnérabilité, mais elles m'ont vu remonter la pente, elles m'ont vu probablement trouver, chercher des solutions, essayer de guérir et après, forcément, il y a tout ce qu'elles n'oublieront pas et c'est de les accompagner afin qu’elles ne reproduisent pas ce que j'ai fait moi aussi. Ça, c’est important pour moi. De mon hypersensibilité, de vouloir sauver des vies entières.

Et il y a quelque chose qui m'a beaucoup marqué aussi dans mon premier échange, c'est à quel point le plaisir et le sens étaient moteurs dans tout ce que Céline fait, le plaisir de faire, le plaisir d'être connecté.

J'ai beaucoup de chance parce que peut être qu'on aura des auditrices qui sont comme moi, qui sont bien sur le mode d'hyper sensible parce que c'est un mot que je n'avais pas utilisé avant. Parce que quand j'ai cherché aussi, quand je suis tombée malade, j'essayais de comprendre… Et c’est la librairie bordelaise : j’ai fait tous les rayons, mais je pense que j'ai fait d'ailleurs toutes les librairies de Bordeaux que je pouvais faire à l'époque avec l'énergie que j'en avais. Je voulais absolument comprendre pourquoi ça m'arrivait à moi. Donc avant d'arriver chez mon thérapeute, j'avais déjà quasi ouvert tous mes sacs, j'avais déjà tout. Et j'avais essayé de faire mon petit cahier. Donc je suis arrivée, j'ai posé mes sacs, tous mes problèmes et j'ai dit « Et je pense qu'en plus je crois que je viens de comprendre plus. En plus, je suis hyper sensible » et là Annie m'a dit « Mais c'est pas une faiblesse. C'est une faille, c'est pas « qu'est ce qu'on va pouvoir en faire » »

Et puis j'ai relu différemment, j'ai résolu le côté positif en me disant qu'est ce que je pouvais en faire ? Et donc, j’ai cette chance là de du plaisir. Quand j'étais malade, ce qui me faisait beaucoup de bien, c'est m'allonger dans le sable, écouter l'eau. Je ne te dirais pas pourquoi, parce que je sais pas, mais c'est très sensoriel et ça te met dans le présent. 

J'allais en forêt, j'ai touché les arbres. 

En fait ce plaisir est inné, et je trouve que je ne prends pas encore assez le temps d'aller en profiter, mais je sais qu'elle est là et c'est important pour moi et d'être connectée, et le sens, je pense que toute ma carrière sera animée par le sens et l’utilité.

Et c'est rigolo, je fais une parenthèse mais tu dis directeur des achats et pas directrice ?

Mais je préfère être choisi pour mes compétences et mes valeurs que parce que je suis une femme. Et ça me va bien quand même. Mais il a fallu qu'on ait un coup de main, qu'on avait peu d'aide, parce que sans ça, sans aide, on y serait pas arrivé. Pour moi, oui, je suis un directeur, une directrice. 

Et ma dernière question à Céline « J'aimerais bien savoir de quoi tu es fière ? »

Je pense qu’à mes deux filles je leur ai dit aujourd'hui que j'étais fière d'elles. Ça, c'est ma raison de vivre. Je suis fière du parcours que j'ai eu, je suis fière de là d'où je viens, de cette méritocratie. 

Je suis fière de plein de choses. Je suis fière aujourd'hui de travailler à la Nouvelle Aquitaine. Très contente d'avoir franchi le pas de l'hôpital, du terra Je suis fière de mon pays. Je pense qu’on a de la chance et on ne s'en rend pas compte probablement. Mais quand on va un peu à l'étranger, on se rend compte de la chance qu'on a d'habiter, d'être français.

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